Le vin de Wolxheim est très largement cité dans les textes et archives qui nous sont parvenus. Loin de moi la prétention de faire l’Histoire du vin de Wolxheim, j’ai simplement relevé ici quelques faits et mentions historiques isolés qui parlent du vin de Wolxheim, et pour faire une liste exhaustive on pourrait créer un site internet dédié…
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Les références historiques du vignoble de Wolxheim sont innombrables et Médard Barth cite Wolxheim 54 fois dans son livre « Der Rebbau des Elsass« .
Le vignoble de Wolxheim était souvent l’objet de dons aux instituts religieux les plus prestigieux de la part des plus nobles régnants depuis la période mérovingienne. C’est donc là déjà un signe de prestige. Cette renommée perdura même au-delà de la révolution alors que le vignoble alsacien perdait toute crédibilité.
Claude Muller, grand historien de l’Alsace, considère que d’un point de vu de l’Histoire, Wolxheim est le seul village vigneron de grand vin du Bas-Rhin.
Le plus vieux vin d’Alsace est un vin de Wolxheim
Quand on visite les superbes caves historiques et médiévales des Hospices Civils de Strasbourg, on peut y voir le fameux vin de 1472 dont il reste un petit tonneau, soigneusement entretenu et dégusté seulement 3 fois. D’où provient ce vin ? De Wolxheim !
Les analyses en laboratoire d’œnologie de 1994 montrent qu’il s’agit là d’un vin, un vrai vin tel qu’on le connaît. L’œnologue note :
« très belle robe brillante, très ambrée. Nez puissant, très fin, très grande complexité, arômes de miel, cire, camphre, épices fines, noisette et liqueur de fruit. En bouche le vieillard a conservé une étonnante verdeur, ce vin présente du volume et finit par une belle longueur ».
On retrouve le caractère des vins actuels sur l’Altenberg de Wolxheim, avec le miel et les épices, son ampleur et sa puissance, et sa belle longueur soutenue par l’acidité !
L’Altarberg de Wolxheim
Autrefois, on mentionnait le grand vin par le nom de la ville. On parlait donc du vin de Wolxheim. Cependant Médard Barth recense plus de 70 « Altenberg » (de Altar-berg ou colline de l’autel) en Alsace, pratiquement tous plantés de vignes, et alors la première mention d’Altenberg remonte à 1188, celui de Wolxheim remonte à 1283. L’Altenberg de Wolxheim est le plus anciennement avéré des Grand Cru Alsacien, pour l’anecdote.
Vin Noble : La qualité du vin est également avérée par les mentions de vin blanc noble « nobilis vini » autour de 1500 à trois reprises. Les archives de la paroisse de Wolxheim mentionnaient en 1510 la culture du cépage noble Muscat, et un règlement de 1523 précise que les aubergistes n’ont pas le droit de mélanger ce cépage « ou d’autres cépages nobles » à des vins de moindre qualité, sous-entendant donc clairement que le Muscat était par défaut synonyme de vin noble. Ces mêmes archives paroissiales racontent comment le curé Agram cultivait et vendait son vin rouge et blanc aux établissements de choix des faubourgs de Strasbourg. Elles prouvent d’ailleurs qu’ici aussi, comme en Bourgogne, les gens d’église cultivaient, sélectionnaient, et vendaient le vin noble.
Vignoble Surveillé : Autre indice de noblesse du vin, le fait que Wolxheim faisait partie des vignobles surveillés pendant la période des vendanges pour les protéger du vol, signe de grande valeur. D’ailleurs, Médard Barth relève un témoignage oral rapportant qu’il existait » s’Bangerthuttel », abri pour le veilleur du vignoble ! La multitude de traces d’attachement religieux avec saints, processions, oeuvres d’art religieux et chapelles témoignent certes d’une dévotion religieuse mais aussi d’une grande importance économique du vignoble pour le village.
Une légende raconte qu’à Wolxheim, Jésus vint un jour déguisé en étranger et frappa chez une veuve qui produisait un Riesling recherché. Elle l’accueilli et lui servait son vin. Une fois l’étranger reparti, elle alla verser le reste de ce qu’il n’avait pas bu dans le tonneau, mais le vin n’en finit jamais de couler du cruchon, de telle manière qu’elle pu remplir des tonneaux de vin et donner de ce vin à tous les nécessiteux sans jamais que la source ne se tari… (Lucien Sittler « Die Elsässische Weinstrasse »)
De bons vivants et des curés bourrés : Bassermann-Jordan relève également avec malice dans le même registre paroissial du fameux curé Agram lors de la fête paroissiale de leur Saint Patron en 1516 « Inventio s. Stephani » le curé du village convia ses copains à fêter cela dignement les 3 et 4 Août en compagnie de 32 hommes d’Eglise le premier jour, puis 20 le deuxième jour. Il s’est ainsi consommé 7 Ohm de vin, et même si le personnel y a aidé, il ne reste pas moins que la consommation moyenne fut de 7 litres par tête de pipe.
Belle plus-value : Dans ses Fragments des anciennes chroniques d’Alsace, S Buheler rapporta avoir acheté à Strasbourg 9 foudres de vin en 1584 provenant partiellement de Wolxheim pour 9 florins l’unité et les revendait 4 ans plus tard à peine pour 25 florins pièce à des négociants de Nuremberg, autre grande place commerciale allemande à cette époque.
Parmi les 19 grands crus cités en 1782 : Billing dans son « Geschichte und Beschreibung des Elsasses und seiner Bewohner », 1782, précise que le vin constitue une très grande source de revenu pour les alsaciens, et que ses grands vins sont exportés jusque dans les royaumes nordiques, et principalement en Allemagne et en Suisse. Le vin de Wolxheim est bel et bien dans les 19 vins de terroir cités, aux côtés des vins de Thann (Rangen), Turckheim (Brand), Riquewihr (Schoenenbourg), Hunawihr (Rosacker) Ribeauvillé (les 3 grands crus), Kaysersberg (Schlossberg), Kientzheim (Furstentum), ou encore Barr (Kirchberg), Andlau (3 Grands Crus) …
Même dans les temps difficiles, le vin de Wolxheim restait une référence. A la fin du 18ème siècle le vin d’Alsace avait perdu beaucoup de son aura, malmené par sa nouvelle position géopolitique, voir ICI et ICI; On lui opposait alors les brillants et très commerciaux vins de Moselle allemande et les vins du Rheingau avec notamment une magnifique maitrise des vins de surmaturité (oui on parle du 18ème siècle mais ça s’applique à aujourd’hui). Eh bien l’historien Grandidier, mort en 1787 établissait, comparativement au vin du Rhin (que j’assimile ici au Rheingau) la cotation du vin d’Alsace en citant le vin de Wolxheim.